Il y aurait tant à dire sur l’élevage de reines !
Alors commençons par le début : comment on en est arrivé là ? Et avec quoi on commence ?
Pourquoi élever des reines
Tout simplement pour garder, améliorer, étendre le patrimoine intéressant de nos abeilles préférées !
On pourrait penser que « la nature est bien faite », et qu’il doit bien y avoir un intérêt à chaque type d’abeilles… Bien que l’apiculteur n’apprécie pas plus que ça les piqûres, et de voir ses ruches disparaître à l’horizon dans une nuée d’abeilles essaimeuses…
Et pourtant, si on y réfléchit bien, c’est un partie (encore) à cause de l’Homme !
Démonstration
Depuis la nuit des temps, l’Homme consomme du miel. Basique, il va le chercher là où il est : dans les arbres, dans une cache naturelle, ou n’importe où ailleurs où il a pu s’installer de lui-même. Donc jusque vers l’an mil, l’homme « chasse » le miel. C’est probablement un peu aléatoire quant à la récolte… Et impossible de parler de sélection sans la moindre « » »domestication » » ».
Vers le milieu du moyen-âge (vers l’an mille pour ceux qui n’ont pas suivi), l’Homme invente la ruche en paille, où il recueille et abrite ses abeilles. Notez que c’est toujours le seul aliment sucrant qui existe, les betteraves et « l’or blanc » ne se développement en France qu’au XIXème siècle sous Napoléon !
La méthode pour récolter est simple : il suffit de soupeser les paniers. S’il est léger, il n’est pas récolté. Si au contraire il est bien lourd… Hé bien il suffit de dégager les abeilles, pour récolter le miel. Soit en enfumant la ruche, et en prélevant le miel essentiellement. Soit en asphyxiant la ruche pour tout récolter (et faire de jolies bougies en cire d’abeilles !). Vous me voyez venir ?
Donc pendant environ 1000 ans, l’Homme a zigouillé les ruches les plus productives, pour ne laisser en vie que celles qui ne produisaient pas ! Quelle contre performance incroyable en terme de sélection !!!!
Aujourd’hui et depuis une centaine d’années environ, avec l’invention des ruches à cadres mobiles (ou les systèmes de barrettes), c’est tout le monde apicole qui a changé.
On peut soudainement observer les abeilles (d’ailleurs, on a longtemps cru que la ruche était gouvernée par un roi ! avant de s’apercevoir que… leur sort était tout autre 😅 et la régence du royaume aux mains d’une reine). On a enfin pu prélever le miel en préservant la colonie !
C’est sans doute l’arrivée du varroa qui a déclenché les vocations des sélectionneurs… Devant l’enjeu de trouver des colonies nettoyeuses par exemple, le challenge était concret, et sans doute plus challengeant que de sortir de récoltes avec le moins de piqûres possible.
Aujourd’hui, sélectionner les meilleures reines est un métier à part entière pour certains apiculteurs (Frère Adam en est un parfait exemple ! J’en parle ici et là ). La majeure partie aujourd’hui, utilise un appareil à inséminer. La technique n’étant pas très compliqué, mais plutôt minutieuse et rigoureuse, elle se démocratise de plus en plus. (Je vous laisse regarder les tuto youtube sur le sujet !)
Ensuite il y a les multiplicateurs, dont l’objectif est plutôt de produire en masse pour vendre des abeilles d’une souche. Ces apiculteurs vont tenter de saturer de mâles « purs » une zone de fécondation, où ils vont regrouper les nucléi pleins de reines vierges. Le but est bien sûr que les petites reines se fassent féconder le plus possible par ces mâles « purs ».
Je classerais en dernier lieu les « petits » apiculteurs, qui vont faire leur propre élevage à petite échelle, avec un peu de matériel et au choix : une bonne loupe, ou une bonne vue !
Matériel : les essentiels
La souche
C’est tout bête à dire, mais je pense que la PREMIERE chose à avoir pour élever des reines… C’est une bonne ruche. D’où qu’elle provienne.
Ca peut être la meilleure parmi vos ruches actuelles, la meilleure parmi les ruches que vous avez achetées, parmi les reines que vous avez achetées, ou la reine inséminée que vous vous êtes offerte sur un coup de tête.
Mais soyons précis : ce sont des toutes petites larves (« de moins de 24h ») issus de la ponte de cette reine qu’il vous faudra.
Le matériel d’élevage au rucher
Non loin de votre ruche préférée (ça évite les kilomètres), il vous faudra une ruche éleveuse. Elle peut n’avoir de « ruche » que le nom.
CARACTERISTIQUES DE LA RUCHE ELEVEUSE :
Il est absolument nécessaire, par un moyen ou un autre, que vous donniez ces larves à élever à des abeilles orphelines.
Il existe autant de possibilités que vous pourrez avoir d’imagination:
- une ruche ou une ruchette orpheline, dans laquelle vous allez avoir une rotation de couvain pour avoir toujours du couvain fermé (sinon les abeilles risquent d’élever sur le couvain ouvert que vous allez leur fournir !), et des provisions si besoin (sirop 50/50, cadre de pollen…)
- une ruche « double » (voire triple mais ça n’a vraiment pas grand intérêt à petite échelle), également appelée ruche éleveuse horizontale, ou « finisseur » horizontal.
Elle est généralement sur 15, 20, 25 cadres (ou autant que vous voulez, mais c’est ce qu’on trouve généralement dans le commerce). Ca consiste simplement en une grande ruche avec une séparation verticale entre une partie généralement fermée (et potentiellement plus petite), et une partie où vous allez avoir une ruche « normale ». Le but étant d’isoler la reine dans une partie (je précise : dans la partie ouverte, je ne vous recommande pas d’enfermer la reine fécondée de votre éleveuse), et de laisser l’autre partie orpheline. Comme dans le 1er cas, il faudra régulièrement apporter du couvain operculé dans la partie orpheline.
Notez que ça fonctionne tout aussi bien en utilisant une ruche que vous avez déjà, et en insérant vous-même une grille à reine verticale.
C’est ce que j’ai pratiqué lorsque j’avais 250 ruches en tant que pro : une simple dadant 10 scindée par le milieu avec une grille à reine verticale du commerce.
Notez que les grilles à reine horizontales, qu’on utilise pour séparer la ruche de la hausse, n’ont généralement pas la bonne dimension. Si vous tenez absolument à ne pas investir, il suffit de fabriquer une cloison, d’en évider une partie, et de combler cet espace avec un morceau de grille à reine standard. Vous veillerez à ce que les échanges puissent bien se faire entre les 2 parties de cette ruche.

J’élève personnellement en mini-plus par série de 10-12 reines environ (un greffage est rarement réussi à 100%).
Cela me permet de greffer rapidement.
Puis de faire mes petits essaims tranquillement le jour même de l’introduction de mes quelques cellules, en général en moins d’une demi-journée !
Il vous faudra aussi des nucléi (rappel de français : UN nucléus, DES nucléi 😉), alias : ensemble boîte et abeilles, destinés à accueillir une reine vierge jusqu’à sa fécondation.
Je vous recommande de commencer simple : vous ferez un essaim artificiel dans une ruchette, et vous introduirez votre cellule royale dedans et c’est tout. Une fois que la ruchette est bien populeuse, vous pourrez la mettre en ruche de production et elle rentrera ainsi dans le cycle sans trop de manipulations.
Personnellement j’utilise des ruchettes 1 cadre, ce qui me permet de remplir rapidement mes ruchettes (je n’en ai qu’une dizaine). Je produits évidemment mes reines en conséquence !
Lorsque la reine est en ponte, je la passe en ruchette 5 cadres, avec l’apport d’un ou deux cadres des couvains avec abeilles (sinon ma ruchette prendrait une éternité à grossir). J’attire votre vigilance sur cette manipulation, car l’ajout d’abeilles d’une autre colonie n’est pas sans risque pour notre nouvelle petite reine ! Dans le doute, vous pouvez l’encager dans une boîte de transport avec un peu de candi, ainsi les abeilles se sentiront assez orphelines pour l’accepter à sa libération quelques heures après. (la boîte de transport aura donc les « ailettes » ouvertes, elle peut donc avoir déjà servi, mais le candi soit être souple pour être consommé assez rapidement, sous peine de devoir revenir libérer vous-même votre reine le soir ou le lendemain)

Il existe une grande variété de nucléi (vois article concernant leur utilisation !)
Je vous recommande également d’avoir toujours sur vous une pince à reine. J’aime la pince à reine, mais vous pouvez tout à fait utiliser ce qui vous plait, tant que l’outil vous permet
– de marquer les reines, et les stocker 1 ou 2 minutes le temps que la peinture/le posca sèche,
– d’isoler la reine le temps que vous cherchiez des cadres de couvain operculé pour l’éleveuse ! (si vous introduisez une reine dans l’éleveuse sensée être orpheline (ou s’il en naît une par inadvertance), l’indice suprême de présence d’une reine sera un résultat sanction de ZERO cellules royales dans votre élevage !😅 )
Le matériel d’élevage
Il vous faudra :
indispensable | facultatif | |
1 | des cupules (plastique ou cire) | des portes cupules |
2 | un picking | un de rechange |
3 | de bons yeux | une bonne loupe |
4 | une journée ensoleillée | une lampe froide |
5 | un cadre d’élevage et 1 barrette amovible | une 2è barrette si vous voulez beaucoup de reines |
6 | une brosse à abeilles | … |
7 | le matériel de rucher (vareuse, enfumoir…) Et du sirop de stimulation | des gants, un tablier |
8 | des protèges-cellules du commerce | du papier d’alu |
1/ j’utilise des cupules collés à la cire sous la barre du haut de mon cadron de mini-plus. En ruche : j’utilisais un cadre d’élevage du commerce avec une barrette amovible garnie de portes-cupules ou non. Les portes-cupules sont collés au pistolet à colle le cas échéant. Sinon les cupules sont toujours collés à la cire afin d’être facilement décollables.
Les portes-cupules restent sur le cadre.
Les cupules sont à utiliser neuves à chaque nouvel élevage.
2/ J’utilise un picking chinois. Comme c’est assez fragile, j’en ai toujours un de secours. J’ai également essayé le picking inox, mais je trouve qu’il exige plus de précision
3/ 4/ Il existe des lampes-loupes, mais faites pour que vous soyez simplement à l’aise pour voir les larves au fond des alvéoles.
5/ Il vous faut un cadre dédié à l’activité l’élevage. Je vous recommande d’utiliser un cadre d’élevage du commerce si vous travaillez en ruche d’élevage (existe par exemple en Dadant).
6/ Afin de ne pas secouer violemment les petites larves, je vous recommande d’utiliser une brosse à abeilles pour retirer les abeilles de votre cadre avec les larves à greffer. Pour l’avoir déjà testé : si vous secouez votre cadre, les petites larves vont quitter le fond de leur cellule, et vous allez vraiment peiner à les attraper au picking.
7/ j’ai bien indiqué les gants en facultatif. A moins d’utiliser comme moi des petits gants latex type chirurgicaux, vous devrez greffer sans gant afin de pouvoir tenir le picking !
Cet après-midi, j’ai greffé dans ma voiture, le cadre coincé entre le volant et mon buste… Ca miellait un peu, et je me suis mis du miel sur le pantalon et aussi le volant de la voiture !! Je vous recommande un tablier, ou n’importe quoi pour protéger vos jambes et votre voiture.
Si vous avez la possibilité de greffer dans un atelier (notamment si besoin de lumière, il vous faudra une prise électrique !), il existe des chevalets. Ils sont très utiles (pourvu qu’ils soient inclinables à différents angles), car vous pouvez alors tenir le picking d’une main, et la barrette de cupules de l’autre, et ainsi vous pourrez pointer du doigt la cupule ou vous êtes rendu, pour remplir la suivante sans vous tromper de la larve suivante.
8/ Voir article technique ! -> par ici
Petit plus : vous devriez naturellement vous demander à quoi ressemble vraiment une larve de moins de 24h…
Il existe dans le commerce des larves étalon afin de vous guider sur la bonne taille des larves (ça coûte un bras, mais c’est pratique quand on ne sait pas !).
Notez que, même si (au début) vous greffez un peu « gros », le mieux est de greffer des larves sensiblement toutes de la même grosseur (ou petitesse plutôt^^), afin qu’elles naissent toutes sensiblement à la même date.
Cela vous facilitera grandement le travail au rucher par la suite !