Le mois de mars va être très différent dans votre pratique d’apiculteur en fonction de votre latitude et du climat !
Il y a même des distinctions de longitude. Par exemple si on compare Laval (53, Mayenne) et Châlons-en-Champagne (51, Marne) : ces villes ont quasiment la même latitude, mais Laval bénéficie d’un climat plus océanique que Châlons-en-Champagne, qui a un climat plus continental.
Ainsi, la flore à Laval fleurit environ 15 jours avant celle Châlons-en-Champagne !
Dans mes articles, je vous parlerai essentiellement de la région Grand-Est. C’est celle que je connais le mieux et dans laquelle je pratique l’apiculture depuis 2007.
Je vais vous présenter des plantes à répartition nationale. Elles vous permettront de prendre vos repères pour pratiquer chez vous.
Première moitié de mars
Au sud de la Loire
En 2023, certains apiculteurs sont en cours de transhumance sur la bruyère blanche (typique des maquis siliceux méditerranéens, légers, profonds et acides du pourtour méditerranéen).
Les premiers essaims ont pu être récupérés dans le Var.
Au nord de la Loire
Le noisetier ou Coudrier
Corylus avellana
Envergure : +- 5m
Hauteur : +- 5m
Propriétés-usage : Les mâles donnent le pollen cher à nos abeilles, les femelles les délicieuses noisettes !
C’est également un arbre truffier.
On consomme bien sûr ses fruits (dont on peut faire de l’huile), mais aussi ses feuilles, ses bourgeons et son écorce pour leurs propriétés médicinales.
Les noisettes servent également à fabriquer le praliné (noisettes torréfiées et caramélisées). Miam ! (cf. recette quand elle sera en ligne !😉)

(Corylus avellana)
Les températures sont encore frileuses. C’est en ce moment que les colonies commencent véritablement leur développement et puisent fort dans leurs provisions. Avec un peson, ou mieux encore par l’habitude, je soulève mes ruches et mes ruchettes. Quand l’une d’elle me paraît trop légère, j’ouvre le couvre-cadres.
Généralement dans ces cas là, je constate que les abeilles sont arrivées tout en haut des cadres et ont finit leurs provisions. C’est même un petit peu tard pour leur apporter un pain de candi (ou 1/2 pain selon la grosseur). Jusqu’à mi-mars, les colonies ont reçu arbitrairement 1kg en cas de faim. Après le 15 mars, celles qui ont été nourries ont reçu 500g.
Deuxième moitié de mars
Les noisetiers ont laissé la place aux prunus, notamment l’épine blanche.
Sans intérêt apicole, on note aussi les floraisons des primevères, des forsythias.
Le prunelier ou l’épine noire
Prunus spinosa
Envergure : +- 3m
Hauteur : +- 2,5m
Propriétés-usage : la prunelle, son fruit, se consomme blette (après les premières gelées), crue ou cuite.
Elle se consomme également en infusion et en liqueur macérée dans de l’eau de vie (à consommer avec modération).
A ne pas confondre avec l’épine blanche, autre nom de l’aubépine, qui fleurit en mai et annonce les essaimages

(Prunus spinosa)


Si les températures le permettent, il est temps de faire la visite de printemps (voir en cliquant dessus, l’article dédié à la visite de printemps).
Si les températures ne permettent pas d’ouvrir les ruches (moins de 15°C), il faut encore vérifier les provisions.
Nous arrivons en effet à la période critique où la colonie se développe de plus en plus, et les réserves diminuent d’autant.
Certaines races d’abeilles ou simplement certaines colonies ayant fait plus ou moins de provisions, c’est le moment charnière où elles peuvent tomber dans la famine sans qu’on n’ait rien vu venir ! Il faudra donc nourrir les plus légères.
J’ai perdu comme ça un certain nombre de ruches dans l’hiver 2021-2022. Après une visite de printemps satisfaisante, il est arrivé une vague de froid dont je ne me suis pas méfiée… Et à mon passage suivant, j’ai largement dû revoir mes effectifs de début de saison à la baisse !
(Avec moins de colonies à gérer, j’en ai heureusement profité pour changer toutes mes reines).
Comment nourrir les ruches au printemps
« Normalement » si vous avez bien géré la mise en hivernage, vos ruches ont assez de provisions. Mais il suffit de peu pour que l’une consomme plus si la reine reprend sa ponte plus tôt, ou si l’autre se trouve dérangée pour une quelconque raison.
Toujours est-il que l’état des provisions est un paramètre à contrôler tout au long de l’hivernage.
Certains utilisent un peson, ou n’importe quel système plus ou moins ingénieux et/ou compliqué pour connaître le poids exact de sa ruche… Encore faut-il connaître le poids vide de la caisse complète + des cadres + de la cire + de la colonie (une abeille pèse 80 à 100mg, avec une ruche en plein hiver de environ 20 000 abeilles, on avoisine encore les 2kg d’abeilles)… pour en déduire le poids des provisions. Et je vous fais encore grâce du poids du couvain ! (rires)
Idéalement, à force d’en soulever des vides, des pleines, pleines d’abeilles, pleines de miel mais vides d’abeilles… On apprend. Aujourd’hui, et je trouve que c’est ma meilleure solution, je soupèse simplement la ruche (sur le côté gauche de manière totalement arbitraire) pour en déduire si elle a encore des provisions.
J’attire votre attention sur un point : les abeilles sont sensées (!) placer leurs provisions au dessus et à l’arrière de la ruche. Certaines ne font pas ça du tout ! Aussi quand je trouve la ruche « légère d’un côté », je m’empresse de lever l’autre côté, voire la ruche entière !
Les ruchettes sont levées en entier, je trouve que l’espace est insuffisant pour que la répartition des provisions soit équilibrée.
Quand c’est trop léger, j’ouvre le couvre cadre (seulement). Il est facile de voir les abeilles qui ont faim : elles sont tout en haut des cadres. On voit tout aussi bien lorsqu’il reste des provisions, justement en haut des cadres.
Notez qu’il m’a été donné l’hiver 2009-2010 de nourrir pendant tout l’hiver une vingtaine de ruchettes (1 à 2kg de candi toutes les 2 ou 3 semaines), et qu’elles ont toutes survécu malgré que j’ai donc ouvert les couvre cadres quelles que soient la météo et la températures, même en décembre, janvier, février… !
Il faut toujours peser avantages et inconvénients.
Ouvrir une ruche, même « que le couvre cadre » refroidit forcément les abeilles. Et oui, elles peuvent en mourir ! Par contre elles peuvent aussi tout à fait mourir de faim si je ne le fais pas.
Je recommande d’avoir le candi à portée de main ainsi que l’enfumoir (s’il fait plus de 8°C), afin de contenir les abeilles qui auraient envie de s’envoler défendre leurs sœurs, et surtout œuvrer avec rapidité et efficacité.
Vous pouvez faire votre candi-maison (on en reparlera à la visite d’automne).
J’ai trouvé plus simple de l’acheter tout fait. (économiquement, au prix de l’électricité et de mon temps disponible c’est ma meilleure option)

Du travail d’atelier-bois
Les caisses vides sont faciles à repérer. Trop légères, elles sonnent « creux ». D’autres peuvent avoir des marques d’animaux (trous de souris, passage de marte…) qui ne laissent aucun doute sur la mort de la colonie.
Par une belle journée, pendant les quelques instants où elles vont juger la température acceptable, les abeilles vont se mettre en mouvement (attention, ça n’en fait pas pour autant une température suffisante pour ouvrir les ruches et faire des visites). Il est alors plus facile de repérer les ruches sans activité apparente…
Je vous recommande à cet égard l’excellent livre « Au trou de vol » de H. STORCH aux éditions européennes apicoles. Grâce à ce tout petit livre de 70 pages, très bien organisé saison après saison, vous pourrez passer des heures (et des heures !) à observer la planche d’envol de vos ruches et y lire ce qui s’y passe à l’intérieur !
Sachant les ruches mortes, devinant les ruches pleines, et toujours selon vos objectifs de l’année, vous devez avancer sur la préparation de votre matériel. C’est le moment de changer une vareuse trouée (ou de la raccommoder), d’aller chercher un crayon Posca de la couleur de l’année pour marquer les reines (2023 c’est rouge !), et quelques menus matériel qui pourrait manquer (cupules pour l’élevage de reines, picking chinois…).
C’est aussi le moment de préparer quelques caisses propres pour enrucher des ruchettes prêtes à déborder, pour accueillir les plus gros essaims, ou pour remplacer les vieilles caisses qui menacent d’auto-destruction (chez moi, passé 10 ans, certaines sont en miettes !). Il faut aussi préparer des cadres, sachant qu’il est recommandé de changer 2 cadres par ruche et par an, ainsi que des cadres pour la fabrication des essaims artificiels… Faites un calcul rapide ! 😉
A cet égard concernant les cadres, j’aime préparer mes cadres en m’assurant juste qu’ils sont propres et que les fils sont bien tendus, mais je ne mets la feuille de cire gaufrée que vers le dernier moment.
C’est une choix personnel, mais les souris et parfois la teigne ayant la fâcheuse habitude de s’installer dans les cadres cirés, je m’arrange pour n’en avoir que ce dont j’en ai réellement besoin.
Donc oui, parfois je « perds » 1h à cirer des cadres alors que je devrais déjà être au rucher. Mais si les souris s’y étaient installées entre temps, selon les dégâts occasionnés, j’aurais possiblement dû recommencer !
Quant à l’idée de protéger les cadres cirés, sachant qu’il faut les protéger des souris, de la teigne, de la chaleur… Cela est sans doute possible lorsqu’on a quelques ruches, mais non gérable (pour moi) avec 30 ou 50 ruches.
Je nettoie et retends les fils d’environ 15 cadres par heure (sans me presser et en écoutant/regardant netflix, j’avoue !!!😂 )
